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Bitcoin, la nouvelle classe d’actif

Bitcoin est la nouvelle classe d’actif qui prends d’assaut Wall Street. CME Group, le plus grand opérateur d’échange de futures et d’options au monde a annoncé le 31 octobre dernier qu’elle débuterait l’échange de contrats futures adossés sur bitcoin à compter du 15 novembre prochain. Compte tenu de l’aversion connue de l’establishment financier envers Bitcoin et les crypto actifs en général, il s’agit d’un développement majeur qui légitimise peu à peu cette nouvelle classe d’actif.

Bitcoin s’est apprécié de près de 25% depuis l’annonce de CME Group

La participation  du CME Group, est un développement étonnant puisque les grandes institutions financières ont une histoire assez conflictuelle avec Bitcoin depuis ses débuts. Nombreux sont les grands patrons de banques ou autres grandes institutions financières à avoir prédit la mort de Bitcoin depuis 2013. Les plus célèbres sont ceux de Jamie Dimon, Président et chef de la direction de JP Morgan qui a dit que Bitcoin est “une fraude et une bulle spéculative qui va ultimement s’effondrer…”.

Disons que depuis les 5 dernières années, les prédictions de M. Dimon se sont avérées plutôt mauvaises.

Déclarations de Jamie Dimon vs. Bitcoin depuis 2013 (Source : Quartz.com)

Parlant de bulle et de fraude, il est intéressant de rappeler que depuis la crise de 2008, les institutions financières (dont JP Morgan) qui ont été sauvées par les fonds publics ont collectivement payé plus de 320 milliards de dollars U.S. en amendes de toutes sortes. Une autre déclaration digne de mention est celle de Tidjane Thiam, le Président de Credit Suisse. M. Thiam a déclaré que “… Bitcoin était la définition parfaite d’une bulle spéculative et que les banques devaient s’en tenir loin”.  Une affirmation à prendre avec un grain sel quand l’on se souvient que Credit Suisse a payé des bonus à ses dirigeants à même les fonds provenant de prêts toxiques suite à la crise de 2008.

Ceci dit, Wall Street s’intéresse à Bitcoin pour une raison évidente : il y a une demande importante de la part des investisseurs (tant les petits que les joueurs institutionnels) d’avoir une exposition à cette classe d’actif. Depuis plusieurs mois, de nombreux groupes tentent d’introduire différents produits d’investissement qui permettraient aux investisseurs de s’exposer à Bitcoin à travers leur compte de courtage. Le 10 mars dernier, dans une décision longuement attendue, la Securities and Exchange Commission (SEC) refusait l’entrée en bourse d’un fonds négocié en bourse promu par les frères Winklevoss, qui sont devenus célèbres suite à la saga Facebook et maintenant parmis les plus importants détenteurs de Bitcoin au monde. Autre décision importante, la U.S. Commodity Futures Trading Commission (CFTC) qui réglemente l’échange des produits dérivés aux États-Unis, a approuvé le lancement de Ledger X, une chambre de compensation pour les options adossées à Bitcoin.

Alternative aux fonds négociés en bourse qui se font toujours attendre, Bitcoin Investment Trust lancé en septembre 2013 par Grayscale, est un fonds fermé (ou fonds d’investissement à capital fixe) échangeable sur le marché OTC (hors cote). Avec maintenant plus de 1 milliard USD$ d’actif sous gestion (AUM), ce titre s’est apprécié de plus de 625% depuis le début de l’année 2017. Avec un frais de gestion de 2% par année (environ 22M USD$ à l’heure actuelle), on comprends rapidement l’intérêt des gestionnaires de fonds d’offrir une exposition à cette classe d’actif à leur investisseurs. À noter toutefois t que GBTC s’échange à une prime qui peut atteindre plus de 100% par rapport à l’actif sous-jacent.

Rendement de GBTC sur l’année (2017)

Au Canada plusieurs initiatives similaires au marché américain ont été ou sont dans le processus d’être lancées. La British Columbia Securities Commission a récemment approuvé le lancement de First Block, le premier fonds adossé à Bitcoin approuvé par les régulateurs. Le Canada est généralement vu comme une juridiction assez favorable pour le développement des crypto monnaies. Le Sénat canadien s’est penché sur la question dès 2014 et l’Autorité canadienne en valeurs mobilières (ACVM) a dévoilé un programme de “Bac à sable” (sandbox) réglementaire qui permet à des entreprises en démarrage de bénéficier potentiellement d’allègements afin de pouvoir tester/implanter leur modèle d’affaires novateur plus facilement.

Un facteur important dans l’émergence progressive de Bitcoin à titre de  nouvelle classe d’actif est lié à ses propriétés d’entrepôt de valeur (storage of value). Plus accessible, plus liquide et surtout plus facile à transiger que l’or, Bitcoin se positionne depuis quelques années comme une formidable alternative. Dans certaines économies où la population est captive de politiques monétaires désastreuses de gouvernements comme le Venezuela ou les dictatures comme le Zimbabwe, Bitcoin est littéralement devenu un moyen de survie et souvent la seule solution abordable pour se prémunir contre l’hyperinflation.

Contrairement à la croyance populaire, la volatilité de Bitcoin est en baisse constante et s’apparente à certains titres boursiers assez communs.

Bitcoin devient donc progressivement une valeur refuge au même titre que l’or avec les propriétés uniques de valeur au porteur et de liquidité/transactabilité de l’argent comptant et le tout est sécurisé par la cryptographie informatique moderne.

En conclusion, nous voyons l’émergence de Bitcoin comme une nouvelle classe d’actif. Cette émergence est supportée par une demande croissante tant de la part des petits investisseurs que des joueurs institutionnels qui souhaitent pouvoir s’exposer à cette nouvelle classe d’actif. L’arrivée de joueurs importants comme le CME Group et CBOE légitimise progressivement Bitcoin auprès des investisseurs institutionnels et ce n’est probablement qu’une question de semaines ou de mois avant qu’on ne voit apparaître le premier fonds négocié en bourse adossé à Bitcoin. Cet événement pourrait facilement faire en sorte que Bitcoin dépasse les 10,000$ USD grâce à un influx de capitaux qui pourrait atteindre le milliard $US ou plus. Le capitalisation totale des crypto monnaies qui est aujourd’hui de près de 200 milliards USD$ pourrait atteindre le trillion de dollars USD$ d’ici 2020.

Bien que la venue de nouveaux véhicules financiers adossés à Bitcoin est largement positive pour le secteur, je suis d’avis que la possession directe de l’actif est de loin supérieure puisqu’elle donne accès aux propriétés uniques de Bitcoin : la sécurité de posséder ses propres clés cryptographiques et la non-dépendance aux acteurs souverains (banques, États, etc.). Je parlerai de ces aspects plus en détails dans un prochain billet.

Jonathan Hamel
Fondateur, Académie Bitcoin

Full disclosure :

  • Je possède des bitcoins
  • Je siège sur le comité consultatif de l’innovation technologique de l’Autorité des Marchés Financiers (membre de l’ACVM)